On considère généralement qu'il existe trois types d'artistes, trois grandes catégories dans lesquelles va se placer un écrivain, un dessinateur, un photographe, un cinéaste, un développeur de jeu, même...

La première catégorie est peut-être la plus ancienne, mais continue encore aujourd'hui à être la plus plebiscitée, il s'agit de la race du conteur. Le conteur, comme son nom l'indique, va raconter un fait, une histoire, de la manière qui lui semblera le plus adéquate. En toutes choses, le conteur considère la fin; un récit ou un dessin est pour lui viable si et seulement s'il possède une introduction structurée, un développement correct et un dénouement acceptable. Les romanciers, les conteurs de récits fantastiques et autres voient leurs capacités augmenter à chaque texte ou dessin. Leur ambition première est de véhiculer une idée via le médium qu'ils auront choisi et de faire réfléchir sur la condition humaine en règle générale. Des trois, il est celui qui arrive à toucher un plus large public car il reste assez terre à terre, même s'il se place dans des univers imaginaires et donc purement fictifs.

La seconde catégorie est apparue sans nul doute après la première, et a fait les beaux jours de la poèsie et des récits lyriques, je veux parler du rêveur. Le rêveur se rapproche plus du stéréotype de l'artiste que l'on peut avoir, la tête dans les nuages, des idées pleins les yeux, de la magie dans les mains. Autant le conteur peut travailler son art, autant le rêveur possède un don. Il voit au-delà des choses réelles, il applique avec talent la maxime du Renard de St-Exupéry: On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux. Et il tente de mettre sur un support tangible, sur papier, avec un crayon ou un pinceau tout ce qu'il voit et qu'on ne peut discerner. Beaucoup de rêveurs sont des incompris. Mais parfois, ils rencontrent quelqu'un qui voit la même chose qu'eux, et alors leurs oeuvres ont un succés d'estime que rien ne peut égaler. Ce sont eux qui bousculent les conventions et font évoluer les choses. Ils travaillent avec les conteurs, car les rêveurs ont tendance à trop s'émanciper, à partir n'importe où, il faut pouvoir les encadrer de manière à ce qu'ils créent de manière efficace. Sans eux, pas de poèsie, pas de chansons, pas de musique.

Le dernier, et sans doute le moindre, celui qui ne devrait pas exister, il s'agit du profiteur. Il utilise à ses fins le travail du rêveur et du conteur, met son nom sur les oeuvres de ceux-ci sans aucun scrupules et récolte gloire, argent et célébrité, qui sont autant de chimères que les vrais artistes repoussent poliment. Ils sont les plus populaires, on les voit et les entend partout, en train de parler d'un livre qu'ils n'ont pas écrit à un journaliste qui ne l'a pas lu. Auparavant riches mécènes permettant au rêveur et au conteur d'être écoutés, ils sont devenus des requins aux dents longues, des exploiteurs, des vilains qu'il faut dénoncer.

Si vous vous sentez l'âme d'un artiste, posez-vous la question: où vous placez-vous ?