Tous les ans à cette époque, la même question ; que nous réserve le futur Fifa ? Car depuis l'arrivée de la Xbox 360 et de la PlayStation 3, la sortie d'un nouveau Fifa est devenue un véritable événement, érigée comme la nouvelle référence de la simulation de football, la série a en effet enchaîné des performances de très haut niveau afin de rester au sommet. Du coup, c'est désormais du côté d'Electronic Arts que les aficionados de ballon virtuel se sont tournés.
Retour aux sources
La bave aux lèvres, les pouces encore parsemés d'ampoules, comme chaque année, ces derniers attendent le nouveau jeu Fifa. Et cette année, c'est essentiellement sur le terrain que la firme a su renforcer. Car il faut bien l'avoeur, l'épisode 10 souffrait de quelques (mais quand même un sacrée bon jeu, 8/0 chez nous) carences. Les gardiens qui partent à la cueillette aux champignons, les traversées solitaires de Drogba ou le jeu à une touche de la balle du PSG, le précédent volet avait presque comme un arrière-goût d'arcade. On était loin de la cuvée 2008, où il fallait poser son jeu et multiplier les passes pour se procurer un semblant d'occasion. Pour les virtuoses du beau jeu à la barcelonaise ou à la nantaise (pour les anciens), tous attendaient le fameux "retour aux sources" employé si souvent dans le monde du football virtuel. Et franchement, après avoir retourné le jeu dans tous les sens, je vous le dit : il est là ! Non, pas le match Barça-Inter qui nous a tous fait vomir, mais plutôt la demi-finale de 1982 entre la France et l'Allemagne, où la circulation de balle prévalait encore sur les compétences physiques des joueurs.
Proche du réel !
La réalisation avait reçu de vives critiques l'an dernier. Sans bouleverser radicalement son moteur graphique, Fifa 11 reprend celui d'Afrique du Sud 2010 en lui mettant un bon coup de polish. Les joueurs bénéficient désormais de nombreuses caractéristiques afin de coller au maximum à la réalité. Les visages tout d'abord, jouissent d'expressions qui changent en fonction de la situation. De la douleur à la frustration en passant par la joie de marquer un but, le résultat est tout simplement saisissant. Et l'on ne se lasse pas de regarder l'attitude de nos joueurs préférés lors des replay. Moins inutile au cours d'un match, le travail sur le morphologie de chaque joueur a été orienté suivant neuf modèles de gabarits contre trois dans Fifa 10. Du coup, on ne regarde plus en bas de l'écran pour savoir quel joeur est sélectionné car la plupart d'entre eux sont reconnaissables au premier coup d'oeil. Mieux, certaines stars possèdent leurs propres animations comme Rooney et son replacement avec son fameux pas chassé si atypique. Si l'aspect visuel est impressionnant, ces implications sur le gameplay le sont tout autant. Grâce à une inertie plus soutenue lors des phases défensives, les petits joueurs vivaces comme Messi peuvent laisser sur place un défenseur d'un simple crochet. En revanche, si ce dernier vous a cramé vous pouvez dire adieu à la balle et prier pour ne pas valser hors des limites du terrain. Cette évolution fait partie d'un système nommé Personnality +. S'il permet au moteur d'arriver à maturité, ce dernier offre également des aptitudes mentales pour chaque joueur. En pratique, on peut par exemple observer la grinta de Carlos Teves qui ne ménage pas ses efforts pour exécuter un pressing haut et se jeter comme un chien enragé sur tous les ballons, à l'inverse, le replacement défensif de Nicolas Anelka se fait une main dans la poche, la tête baissée, vous donnant l'envie de lui balancer une insulte désormais gravée dans les annales. Ces différences de comportement, on les retrouve aussi du côté de la défense avec des latéraux qui se projettent plus ou moins vers l'avant selon l'état d'esprit des joueurs, et une charnière centrale qui peut jouer le hors-jeu instinctivement. Du coup, il faut connaître son équipe sur le bout des doigts pour jouer sur les qualités et les défauts de vos joueurs. La dernière fonction de ce Personnality + est de peupler les matchs d'aléas bien connus de notre chère équipe de France. En effet, il n'est pas rare de voir un attaquant manquer son contrôle ou se prendre les pieds dans la gazon lorsque l'on veut dégager la balle. Plus qu'un simple match virtuel, les rencontres de ce Fifa 11 s'apparentent un peu à la réalité.
Simulation
Soyons honnête, faire circuler la balle à la manière d'une offensive du Barça avec des équipes de ligue 2 commençait doucement à nous faire grincer des dents. On s'était même résolu à ce que Fifa nous fasse une "PES" (enfin les derniers volets surtout) en s'orientant vers de l'arcade pure afin de toucher un plus large public. Heureusement, le feedback de la communauté Fifa a réussi à faire admettre à l'éditeur qu'il était temps de revenir vers un jeu plus posé. Et cette volonté passe par une nouvelle feature nommée Pro Passing. Dorénavant, chaque passe, chaque centre et même chaque dégagement résultent de multiples statistiques. Finies les passes à l'aveugle de Makélélé et autres tours de reins surhumains, cette fois il faut tenir compte de l'équilibre du joueur, de l'angle ou de son état de forme pour espérer atteindre son but, évidemment, avec une équipe comme Chelsea ou celle du Real de Madrid, ce sentiment de gâchis se fait ressentir essentiellement en fin de rencontre. Mais pour des équipes plus faibles, construire une attaque nécessitera de la patience et surtout beaucoup de talent. Ainsi, on se retrouve à porter davantage le ballon pour trouver le placement idéal. Mais ceux qui connaissent bien Fifa 10 savent qu'un contrôle de trop rime automatiquement avec perte de balle. Le double pressing n'est désormais plus aussi efficace du fait de l'inertie plus prononcée des joueurs. Pour défendre correctement, il faut privilégier une couverture en zone pour intercepter une passe, plutôt que de se jeter tête baissée.et de prendre un méchant râteau. Le rythme des rencontres perd du coup légèrement de son intensité, atténuant considérablement l'orientation arcade de la série prise depuis deux ans.
Toujours en recherche de réalisme, Fifa 11 a décidé d'introduire un nouveau système basé sur des critères de situation et sur les aptitudes des joueurs. En clair, il faut être en bonne position et plutôt doué pour délivrer une passe dans les meilleures conditions. Cela oblige donc à s'appliquer, à prendre du temps pour contrer les défenses de fer. Afin de faciliter les transmissions, la vitesse du jeu a été quelque peu ralentie, et l'inertie des joueurs renforcée. Si les intentions sont louables, ce changement majeur de philosophie va clairement obliger les joueurs à changer leurs habitudes. Accepter de manquer un geste facile, de se faire reprendre après avoir fait la différence et de devoir ramer avant de se créer une vraie occasion. Cela est d'autant plus gratifiant lorsque l'on y arrive, mais peut aussi générer de la frustration. Surtout lorsque le gardien gagne son duel. Autre inconvénient, ce phénomène n'encourage pas à prendre les équipes les plus faibles, et les matchs risquent de se résumer à des affrontements entre dix grosses équipes. Pour créer des décalages, mieux vaut donc maîtriser la conduite des balle, l'opposition du corps et tabler sur des joueurs très techniques ou très physiques (la combinaison des deux étant plus que conseillée). Rooney, Drogba, Ronaldo,Torres,Tevez,Ibrahimovic sont sans aucun doute les chantres de ce jeu. Une fois le ballon récupéré, la technique consiste à temporiser en navigant dos à la défense tout en utilisant le déplacement lent. Tenter des crochets, jouer du contre-pied et de l'inertie des défenseurs sans forcément y aller de son dribble s'avère rudement efficace. Reste à gérer les déplacements de ses coéquipiers ou à trouver la faille tout seul pour se créer de belles occasions.
L'oeil du coach
Outre les différentes évolutions censées rapporter l'aspect simulation au jeu, cet épisode corrige bon nombre de défauts aperçus l'année dernière. Le gardien de but redevient ce qu'il aurait toujours dû être, à savoir le dernier rempart de la défense. Exit les sorties scriptées qui se finissent généralement par un lob tonitruant, cette fois le goal reste fermement cramponné à sa ligne de but, si toutefois vous ne le faites pas sortir manuellement. Plus impérial dans les airs, il ne se laisse plus avoir par le fameux centre au second poteau. Et grâce à des nouvelles animations, ce dernier s'en donne à coeur joie pour stopper vos multiples tentatives. Claquette, dégagement aux poings ou arrêt réflexe, il faut maintenant s'appliquer pour espérer transpercer les filets. Malheureusement, on ne peut toujours pas compter sur le jeu aérien pour nous aider à marquer. Si la bataille "pré-jump" demeure un régal, les coups de tête manquent à nouveau de puissance et de précision. On ne sait toujours pas pourquoi un joueur peut planter un but d'une tête à quinze mètres, alors qu'il peut louper une minute plus tard un coup de boule à bout portant.
Critiqué pour sa simplicité et son manque de challenge, le mode Carrière a subi une large refonte, à l'image des jeux de management bien connus des PCistes, le titre vous place dans la peau du coach où il faut gérer le côté sportif du club, mais aussi le financier. Afin de vous immerger dans vos nouvelles fonctions, ce mode met en place un univers complet autour du club avec comme principal acteur, des médias enragés. L'éditeur a aussi revu le système de transfert jugé primaire. Désormais, les négociations avec les différents clubs sont tenaces et la valeur marchande d'un joueur résulte enfin de son potentiel futur. De plus, quel que soit le championnat choisi, il est possible de suivre en direct les résultats de ses voisins et examiner en profondeur l'évolution d'un joueur. L'autre mode Carrière Deviens un Pro, à lui aussi bénéficié de quelques retouches. En effet, le titre vous permet de créer un joueur, mais aussi de vous placer sur le banc en costard en tant que coach. Dans ce cas précis, vous avez deux possibilités : vous concentrer uniquement sur le métier d'entraîneur en gérant les formations et autres transferts ou allier des deux fonctions comme cela se fait dans certaines équipes amateur, où le coach fait parti du 11 de départ.
En Virtual Pro, le nombre d'objectifs à accomplir est passé de 230 à 400, avec une multitude de bonus à débloquer, notamment tous ceux liés aux gardiens de buts (casques, gants...) et aussi plus d'accessoires fun. Du très bon en somme. Mais autre innovation également de ce Fifa 11, le onzième homme est désormais jouable. Il est en effet possible d'incarner le gardien en mode Deviens un Pro pour livrer des parties à 11 contre 11. Mieux encore, on peut aussi garder les cages avant les matchs et en entraînement dans l'arène ! La caméra a donc été entièrement adaptée pour proposer des perspectives idéales. Idem pour les contrôles spécifiques, essentiellement basés sur le timing et qui sont au choix assistés, semi-assistés ou entièrement manuels. Là aussi, c'est vraiment excellents.
Du côté physique
Mais le problème avec le réalisme, c'est que cela peut parfois être pesant. Au niveau des collisions, il n'est pas rare que ce soit la foire d'empoigne en milieu de terrain et que les joueurs tombent successivement comme des mouches. La physique de balle est encore un peu fantaisiste sur certains contres, et le changement de joueurs toujours aussi peu réactif. Il en va de même pour les frappes au but, qui sont certes améliorées mais qui sont encore loin de la perfection. Molles ou surpuissantes, ces dernières n'arrivent que très peu à destination. La frappe en finesse est pour sa part assez bien gérée, mais les performances hallucinantes des gardiens font qu'il est plus que difficile de concrétiser une action qui aurait dû être décisive. Avec les défenses hermétiques, les centres sont devenus redoutables tant les attaquants redoublent d'effort pour la mettre au fond. Un atout majeur, renforcé par la difficulté des défenseurs à dégager de la tête (un problème récurrent de la série). Idem pour les duels aériens hors surface, qui sont aussi pénibles qu'aléatoires, occasionnant même quelques "crabes" (loupé magistral du joueurs qui se bloque et manque le ballon) assez malvenus. Enfin, la physique de la balle a été quelque peu alourdie et les effets brossés sont superbes, mais on est encore assez loin du compte en termes de maîtrise. On a souvent le sentiment de ne pas avoir été pleinement acteur d'une belle frappe cadrée. Et surtout, de ne pas pouvoir la reproduire à loisir dans des conditions identiques. Il en va d'ailleurs un peu de même avec les passes, qui n'arrivent pas toujours à destination à cause de scripts qui perturbent le jeu. La passe s'adresse systématiquement au joueur hors-jeu. Dans la surface, impossible de mettre le ballon pour un joueur qui arrive lancé. De plus, les passes dans les pieds se transforment en passes en profondeur (et inversement) sans raison valable. Heureusement que l'on peut désormais tendre les trajectoires de balle pour accélérer le jeu et adresser des transversales aussi efficaces que savoureuses.
Encore plus de réalisme
Avec son numéro 11 dans le dos, ce Ffa nouveau a clairement décidé de faire dans la démesure niveau contenu. Possibilité de jouer les gardiens, jeu en ligne à 11 contre 11, centre de création, mode Deviens un Pro avec le double d'objectifs, carrière sur quinze ans (avec possibilité d'incarner un joueur, un joueur/entraîneur ou un entraîneur à loisir), gestion libre de la musique et des environnements sonores : tout ou presque est possible. Sans oublier les affrontements classiques en ligne, dont le code est encore amélioré. Il ne manque plus que de contrôler l'arbitre ! Arbitre qui, au passage, peut être choisi en fonction de son style et qui n'hésite plus à sortir la biscotte pour une simple poussette. Il est d'ailleurs largement sollicité dans le jeu, puisque les contacts sont plus que nombreux, à ce propos, on note que le pressing en défense n'est plus aussi efficace et que le double pressing est presque devenu inutile.
Mais quoi qu'il en soit, ce Fifa 11 est plus qu'un bon jeu tant dans son contenu que dans sa nouvelle orientation. Très exigeant, il ne recule devant rien pour proposer une simulation hors pair, quitte à laisser les joueurs à la recherche de spectaculaire sur la touche. Rugueux, il oblige à la construction et aux choix tactiques en privilégiant les duels physiques, et condamnant presque le joueur à l'exploit s'il veut se créer de réelles occasions franches. Un parti pris qui oblige tous les fans à revoir entièrement leur façon de jouer et d'aborder les matchs, qui-du coup- devient un véritable moteur d'achat de ce nouvel opus. Sorte de mélange de l'exigence extrême du 08 et de la technique irréprochable du 10, il alterne frustrations et satisfactions en restituant toute la pression et le stress d'un vrai match de football. On en sort usé, parfois dépité, mais toujours ravi d'avoir livré une vraie bataille. Ce titre est solide et il est très difficile d'aller le chercher sur son terrain.
Réaliste, c'est bien ce qu'il en ressort de ce Fifa 11. Si sa réalisation arrive enfin à maturité sans pour autant être un bouleversement spectaculaire, c'est principalement sur le gameplay que Fifa 11 impressionne. Moins rythmés mais plus profonds, les matchs collent désormais véritablement à la réalité. Et franchement, on ne peut que s'en féliciter.