Rapt d'Enis : ce que prétend le ravisseur
CYRILLE LOUIS.
Publié le 18 août 2007
Actualisé le 18 août 2007 : 15h10



Francis Evrard a été mis en examen hier soir pour « enlèvement et viol sur mineur » puis écroué. Il aurait drogué l'enfant.

« JE NE COMPRENDS pas que le médecin ait pu juger cet homme apte à sortir. Il ne peut pas guérir : s'il aime ça, il continuera toujours. » À sa façon, Mustafa Kocakurt a résumé hier l'amer constat qu'inspirent le rapt et le viol de son fils âgé de cinq ans, mercredi à Roubaix (Nord), par un pédophile récidiviste libéré le 2 juillet dernier en fin de peine, malgré un risque de récidive jugé « très sérieux » évalué par les experts psychiatres.

Meilleure prévention de la récidive

À l'issue de sa garde à vue, Francis Evrard, 61 ans, a été déféré hier soir, mis en examen pour « enlèvement de mineur et viol aggravé en récidive », puis écroué. Devant les policiers, l'homme a reconnu avoir agressé le petit Enis, évoquant des « pulsions » auxquelles il n'aurait su résister. Dans le box qu'il occupait sur un parking de Roubaix, la PJ a découvert une mallette remplie de somnifères au moyen desquels il a peut-être drogué le jeune garçon. Les investigations se poursuivront dans les prochains jours afin de déterminer si le pervers a pu faire d'autres victimes depuis sa sortie de prison.

Condamné à vingt-sept ans de réclusion en 1989 pour le viol de deux enfants de 7 et 8 ans dans le Nord, Francis Evrard a été remis en liberté sous « surveillance judiciaire » il y a un mois et demi. S'appuyant sur l'avis d'un psychiatre qui, en décembre 2006, l'a jugé susceptible de récidiver, le tribunal d'application des peines de Caen a en effet subordonné sa libération à l'observance d'un « traitement antihormonal » et d'un suivi médical. Par ailleurs, Evrard, qui avait l'obligation de signaler tout changement d'adresse, était convoqué chez le juge d'application des peines (JAP) le 24 août prochain. « C'est tout le drame, commente l'avocat de la famille d'Enis, Me Emmanuel Riglaire, malgré l'existence de dispositifs efficaces pour prévenir la récidive, la justice, faute de moyens, a pris le risque de laisser un individu dangereux dans la nature parce qu'elle manque de personnel pour surveiller étroitement les criminels sexuels. »

Réagissant à l'agression d'Enis, Nicolas Sarkozy a convoqué lundi une réunion afin d'organiser une meilleure prévention de la récidive des personnes condamnées pour des crimes et délits sexuels. On ignore cependant le nombre de délinquants auxquels un tel dispositif pourrait à terme s'appliquer. Pour l'heure, quelque 37 000 personnes mises en cause ou déjà condamnées sont inscrites au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, créé durant l'été 2005. Mais toutes ne présentent pas le même risque de récidive : on juge généralement que 10 à 15 % des condamnés pour un crime sexuel réitèrent après leur remise en liberté. Selon une estimation officieuse, plusieurs centaines de personnes pourraient à terme se voir imposer le port d'un bracelet électronique mobile suivi par GPS afin de garantir leur suivi permanent.

Quoi qu'il en soit, les syndicats de magistrats s'accordent à souligner le manque de moyens consacrés à la mise en oeuvre du suivi sociojudiciaire institué en 1998, ainsi qu'à la surveillance judiciaire. De son côté, la Chancellerie rétorque que « le nombre de JAP a augmenté de 70 % ces cinq dernières années », tandis que le nombre de travailleurs sociaux employés à la réinsertion des détenus devrait atteindre 2 800 l'an prochain, contre 1 800 en 2002.

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