UNE COQUILLE DANS LE JUGEMENT ET LA PEINE DU VIOLEUR EST DIVISEE PAR DOUZE
A la barre du tribunal correctionel de Nice, Sébastien avait été condamné début octobre dernier à 6 ans de prison. Le président avait bien prononcé la peine : six-années-d´emprisonnement-ferme. Mais au bas du jugement définitif signifié par écrit à son avocat, Me Adam Krid, les 6 ans de prison étaient devenus... 6 mois. Divisée donc par douze. Simple erreur matérielle! Et pourtant, si la requête en rectification déposée en urgence par le parquet n´était pas retenu le 1er décembre prochain par la justice, ce Niçois de 15 ans pourrait être tout simplement exonéré des six ans de prison dont il a pourtant écopé pour viol.
Histoire de fou. Car sa remise en liberté pure et simple est tout à fait envisagable. Plus que ça même. Mandaté par ses grands-parents, son avocat est formel : C´est la loi. On ne passera pas un coup de blanco sur cette erreur de transcription (voir par ailleurs). Pas plus ici, que ce fut le cas aux Antilles récemment, explique Me Adam Krid.
La jurisprudence constante de la Cour de Cassation lui donne en effet raison. Ainsi, en rédigeant son jugement définitif en 2003, le greffier du TGI de Fort-de-France avait alors écrit 5 mois à la place de 5 ans. D´appels en cassation, cette peine de prison peau de chagrin a été confirmée... Et les exemples sont légion, parfois même totalement surréalistes (voir par ailleurs).
La fureur de la victime
Un vrai bug judiciaire qui tiendrait presque de la farce... s´il n´y avait la détresse des victimes. Or, les faits de viol qu´on reproche à Sébastien avaient en effet été jugés suffisament graves pour que, le 6 octobre, le tribunal des enfants statue en matière criminelle. Une vraie cour d´assises des mineurs! Une grande première à Nice. Et Me Nathalie Elmoznino, avocat de la victime, tient à le marteler : Il y a l´esprit de la loi et la lettre. Remettre en liberté Sébastien poserait un vrai problème de trouble à l´ordre public pour la société dans son ensemble, pour sa victime... et pour lui-même dès lors qu´à la barre il n´avait manifestement pas intégré extrême gravité des faits qu´on lui reprochait.
Faire appel du jugement
Alors quoi? L´avocat de la victime en appelle au parquet général d´Aix. Il faut faire appel du jugement. Ainsi, si la rectification de la coquille n´était pas acceptée, si les 6 mois de prison ne redevenaient pas 6 ans, Sébastien pourait être rejugé et condamné cette fois à une peine, validée à l´oral comme à l´écrit. Un point de vue partagé par Eric de Montgolfier que le procureur général d´Aix a entendu hier en fin de journée.
Reste que d´ici à ce que Sébastien comparaisse de nouveau devant ses juges, Me Adam Krid entend obtenir sa remise en liberté : Cette faute de frappe est sans doute le fruit de la misère de la justice française. Pour autant, c´est un cas manifeste de détention arbitraire.
En clair, contrairement à l´adage populaire, les principes ne sont pas toujours des prisons!
DEUX PEINES DE PRISON INVERSEES!
Kafkaïen! Souvent galvaudé, le qualificatif est en l´espèce plus qu´approprié. A Nice, c´est la coquille qui revoit à la baisse le quantum d´une peine de prison. A Montpellier, en décembre 1997 c´est l´inverse qui s´était produit... du moins pour l´un des deux braqueurs condamnés par la cour d´assises. Le premier avait écopé à la barre d´une peine de 12 ans. Son complice, bénéficiant sans doute de circonstances atténuantes, s´en était sorti avec 9 ans. Trois ans de moins! Pas une paille. Mais, pour cause de faute de frappe lors de la rédaction du jugement, les peines furent inversées. La logique eût certes voulu qu´on rectifie ce bug. Il n´en fut pourtant rien. On ne modifie pas l´autorité de la chose jugée : la cour d´appel puis la cour de Cassation confirmèrent l´erreur... en vertu de l´article 710 du code de procédure pénale. Plus fort que Prison Break... mais cette fois dans la vraie vie!
CE QUE DIT LA LOI
C´est entre autres sur le fondement de l´article 710 du code de procédure pénale que Me Adam Krid fonde aujourd´hui sa requête de mise en liberté de son client. Le dit article précise clairement que les juridictions pénales sont sans pouvoir pour modifier les peines prononcées telles qu´elles sont portées sur la minute du jugement signée du président du TGI et du greffier qui, seule, fait foi.
En clair, l´écrit prévaut sur le prononcé à l´oral à l´audience... sauf à démontrer que l´erreur est en fait un faux.

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posted the 11/19/2006 at 03:10 PM by
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