L’Occupation Pisane
Les désordres que connait la Corse encouragent les tentatives de domination extérieure de Pise et de Gênes.
En raison de l'influence dominante de Pise, au XIe siècle, les papes accordent à l'évêque de cette cité l'investiture des évêques corses.
Mais Gênes jalouse cette cité rivale.
Pour l'heure, pise règne et gouverne. Gouvernement sage qui laissera des regrets dont on entend l'écho deux siècles plus tard chez Giovanni della grossa.
Le gouvernement des pisans fut par tous extrêmement loué, parce que leur juges savaient parfaitement se concilier l'amour des habitants qu'ils fussent riches, modestes ou pauvres, en gardant chacun à sa place les seigneurs les gentilshommes, les gens du peuple et les autres.
C'est pourquoi, vivant en paix, étroitement unis, oubliant les malheurs du passé, les Corses purent édifiés ses belles églises anciennes, ses ponts superbes, et tant d'autres édifices d'une architecture excellente et d'une maîtrise singulière dont on voit aujourd'hui encore quelques exemplaires.
C'est rendre hommage à la seule véracité que de saluer l'œuvre pacificatrice du gouvernement Pisan au moment où elle s'achève et où la Corse passe pour des siècles sous la domination d'un nouvel occupant.
En effet, Pise est affaiblie par des querelles internes et répudiée par le Saint-Siège, elle doit alors faire face aux convoitises Génoises.
Les génois, qui avaient pourtant aider le gouvernement de Pise à expulser les Sarrasins de l'île, engagèrent alors les pisans dans un conflit opiniâtre qui se termina par la destruction de la flotte Pisane en 1284.
La Corse devient Génoise pour six grands siècles.
La Domination Génoise
Les génois, qui avaient aider les Pisans à expulser les Sarrasins de Corse convoitaient aussi l'île. Ils engagèrent alors les Pisans dans un conflit opiniâtre qui se termina par la destruction de la flotte Pisane en 1284.
Le triomphe de Gênes était total. Il fut officiellement sanctionné, en juillet 1299 par la trêve signé entre elle et Pise.
La Victoire Navale de Meloria, en 1284, mais surtout les campagnes de Luchetto Doria, en 1289, et de Nicolô Boccanegra, en 1290 lui avait déjà valu les ralliements des féodaux abandonnés par Pise, qui, dès 1288 renonçaient à ses châteaux et à ses domaines insulaires.
La Corse lui appartenait désormais sans partage en dépit du Saint Siège lui-même, qui , en 1297 essayait de la lui arracher pour la donner à la maison d'Aragon, qui n'en eut cure sur le moment.
Gênes n'a cependant pas la tache facile, il lui faut d'une part s'imposer face aux ennemis de l'intérieur: toujours aux Sarrasins, dont on tentera plus tard de limiter les dégâts en ceinturant l'île d'un chapelet de tours de guet, mais aussi face aux Aragonais, installés en Sardaigne et qui nourrissent l'ambition de se tailler un empire méditerranéen; ensuite face aux Français qui, au temps des rois Valois, considèrent Gênes comme l'alliée de l'Espagne et voient dans la Corse un pion maître sur l'échiquier international.
Que de convoitises étrangères autour d'une petite île !. Les convoitises génoises sont les plus fortes, parce qu'elles s'étalent sur la puissance bancaire et la vocation coloniale de la Superbe République.
D'autre part, Gènes doit mater les insulaires, qui sont têtus. Au sud de l'île, elle est aux prises avec les familles féodales de la Terre des Seigneurs.
Au nord, avec une confédération de communautés villageoises, la Terre du Commun, ou chaque paroisse a son Podestat, son Procureur, ses gardiens, ses caporaux. Gênes se décharge d'abord de ses responsabilités sur une société par actions (la mahone ), puis sur la Banque de Saint-Georges, qui implante en Corse une administration hiérarchisée, sans parvenir à triompher de la résistance active ou passive des insulaires.
Le Doge reprend alors la Corse en main, en la confiant à un Office qui dispose de la toute-puissance, personnifiée par un Gouverneur.
L'île est divisée en dix provinces, elles-mêmes divisées en pieves, qui sont soixante-six au total: la pieve génoise ne fait que reprendre un vieux partage de la terre Corse. Elle tire son nom du latin plebs, qui désigne une collectivité de familles (comme les ple, pleu ou plou de la Bretagne romanisée). Ce cadre administratif est destiné à subordonner les féodaux du Sud aussi bien que les communautés du Nord.
Il serait injuste de condamner en bloc la gestion génoise. La Superbe ne se donne pas pour mission d'opprimer. Elle s'est assurée de la Corse pour des raisons stratégiques. Elle la garde pour des raisons commerciales. Son objectif est de se servir de l'île, plus que de la servir. Mais l'un n'exclut pas l'autre.
Gênes construit, Gênes urbanise (Bastia, devenue le siège du Gouverneur), Gênes protége les cultures contre les troupeaux, stimule les plantations d'arbres fruitiers. Mais aussi Gênes prélève de lourds impôts, prétend interdire le port d'arme, condamne aux galères, cherche a implanter sur la côte occidentale des Grecs chassés par les Turcs et dont les Corses ne veulent pas.
De l'île, les Génois font venir les huiles de la Balagne, les vins du Cap, les huîtres des étangs lagunaires, du bois, de la poix. Tenant à l'exclusivité du commerce Corse, ils interdisent toute exportation sans autorisation préalable et frappent de droits tous les produits, à l'entrée comme à la sortie.
De la tutelle génoise, I'île conservera, avec ses ponts et ses tours, un idiome le plus souvent apparenté au toscan, une certaine façon de vivre et de mourir, le sens des processions publiques et du faste funéraire. Ce n'est pas un mince héritage.
C'est à la mort de Giudice, que les génois n'urent plus à se préoccuper des affaires de Corse, car l'île, demeurant privée d'un chef suprême les anciens gentilshommes qui s'y trouvaient reprirent possession de leur terre.
Ayant conquis la Corse, Gênes s'en désintéressa alors momentanément. Cela n'est pas surprenant, quand on sait que la Capitale Ligure qui est alors à l'apogée de sa puissance n'a aucun intérêt économique immédiat à exploiter une île qu'elle ne s'est appropriée que pour des raisons stratégiques essentielles.
La Tentative Aragonaise
En 1297 le pape Boniface 8, pour réaffirmer sa souveraineté théorique sur les îles avait enlevé à Gênes la Sardaigne et la Corse pour en investir le roi d'Aragon Jaime II.
Investiture qui fut renouvelée en 1305 par le pape Clément V. Mais la maison d'Aragon se préoccupa d'abord de s'emparer de la Sardaigne.
Gênes, affaiblie par les menaces de ses assaillants externes dans plusieurs de ses conquêtes, doit aussi faire face à une grave crise interne qui pour des décennies l'empêchera d'intervenir en Corse. C'est ce moment que choisit Aragon pour faire valoir ses droits sur la Corse.
Une telle indifférence de Gênes, devant la menace aragonaise s'explique par le fait que les génois et les aragonais avaient été alliés contre la maison d'Anjou en Sicile, et que , en Sardaigne même, c'est aux Pisans que s'en prennent d'abord les soldats de Jaime II. Mais bientôt le sentiment du danger assaille les deux cités rivales qui unissent leur forces dans un tentative infructueuse de reconquérir la Sardaigne en 1325.
Pendant quelques années s'établit alors un modus vivendi : moyennant le passage sous la souveraineté aragonaise des possessions des dorias en Sardaigne, l'Aragon renonça à ses droit sur la Corse.
Mais lorsque en 1346, les troupes du roi d'Aragon Don Pedro, débarque dans la région de Bonifacio, Gênes entre en nouveau en lutte contre les aragonais et leurs alliées Vénitiens, alors force est aux génois de s'intéresser de près à la conquête définitive et à l'occupation stable de la Corse qui devient maintenant pour eux un élément vital de leur survie, le dernier rempart contre la prépotence de ses adversaires.
Gênes sortit victorieuse du conflit, mais les nobles Corses ne se soumirent qu'au début du XVI siècle, après une succession de révoltes au cours desquelles ils luttèrent désespérément contre Gênes jusqu'à l'anéantissement de leur propre puissance.
L’office de St Georges
Vincentello d'Istria qui avait aidé l'Aragon dans sa tentative d'investigature venait de mourir.
Les luttes entre féodaux reprirent de plus belle, Vincentello d'Istria disparut, l'Aragon écarté, Gênes indifférente ou impuissante, tous conspiraient pour transformer une fois encore la Corse en champ clos de rivalité personnelle.
L'île traverse alors l'une des périodes les plus chaotiques d'une histoire pourtant agitée.
Une période de rivalité entre féodaux Corses, clans génois et le pape Eugène IV aboutit, en 1453 à la session du gouvernement de l'île à l'Office (Banque) de St Georges.
Les Capitulats Corsorum règlent le système administratif. L'office fait preuve d'une énergie rigoureuse, battit des tours sur le littoral, reconstruit les forteresses et fonde des villes fortifiées, Ajaccio (1492), et Porto-Vecchio (1539).
La Guerre de Corse
1553 - 1569
Le royaume de France convoite la Corse dont le peuple ne supporte plus le joug génois. Une révolution se prépare et est sur le point d'éclater avec à sa tête Sampiero Corso allié donc aux Français et aux Turques.
L'effet de surprise est total et Gênes devant l'énorme disproportion des forces (Infériorité numérique et très dispersé de surcroît) ne pourra que constater les dégâts.
La chute de Bastia ne demande que quelques heures. Les commissaires génois s'enfuient alors vers Corté qui sans garnison se rend avant même d'avoir été attaqué par Sampiero et ses compagnons Corses.
Ajaccio ouvre ses portes à Sampiero et comme St Florent, est rapidement fortifié et pourvu d'une bonne garnison.
Deux points noirs dans ce tableau : Calvi et Bonifacio, à l'abri de leurs remparts, habitées par des populations Ligures dont la fidélité ne démentira jamais.
L'une et l'autre vont opposer une farouche et efficace résistance. C'est en vain qu'à Calvi, Sampiero tente de convaincre les assiégés de se rendre.
Bonifacio, quant à elle, assiégée par terre et par mer, résiste héroïquement et bien que manquant de tout, sauf de vaillance, elle ne succombe finalement que par la conjonction d'une traîtrise.
Ainsi, en quelques semaines, la Corse était conquise, à l'exception de Calvi.
Les chefs Français pouvaient entonner un chant de victoire, en effet, le bilan était flatteur : les Génois, à l'exception de ceux de Calvi et de Bonifacio n'avaient opposé qu'une résistance faible ou nulle. De très nombreux Corses s'étaient ralliés et enrôlés.
La réussite de l'expédition, était en grande partie due à la flotte Turque.
Celle-ci partie pour l'Orient, la flotte Française rentrait à Toulon, le front de mer se trouvait dégarni. Au moment même où se préparait la contre-attaque de Gênes avec l'aide de l'Espagne et de la Toscane.
Malgré son grand âge (87 ans), le vieil amiral Génois Andéa Doria prit lui même la tête d'une puissante escadre mi-génoise, mi-espagnole, qui embarqua la plus forte armée que Gênes est jamais mise en ligne.
Contre une telle puissance navale et terrestre, que pouvait faire les quelques soldats français, même avec l'aide des volontaires Corses, et malgré les mesures prises par De Thermes pour fortifier St Florent et Ajaccio ?
Bastia se rend après huit jours (Novembre), St-Florent résiste 3 mois (de novembre 1553 à février 1554) mais finit par capituler dans l'honneur et non sans avoir affligé de lourdes pertes aux assaillants. Corté se rend sans poser de résistance.
Le Cap est dévasté et les renforts ne cessent d'arriver, 2500 Espagnols, 1000 Allemands et même des volontaires Corses recrutés sur le continent.
Pendant ce temps, De Thermes opposait une passivité qui lui valut les plus vives critiques, les renforts envoyés de France se révélaient insuffisants et l'amiral de La Garde ne semblait guère pressé de livrer combat à la flotte génoise.
Tout au plus réussit-on à récupérer Corté, d'où Sampiero lancera des attaques souvent victorieuses (à Vescovato), mais qui ne suffiront pas à renverser la situation.
La suite ne sera plus constitué que de guérillas meurtrières et infructueuses, qui entretiennent le moral des Corses révoltés mais qui entraîneront de féroces représailles jusqu'à la trêve de Vaucelles.
La guerre de Corse se transforme en guerre d'usure et s'enlise.
Paris ne fut guère content de cette entreprise qui avait si bien commencée et rappela De Thermes (pour le remplacer par Giordano Orsino) et Sampiero pour l'écarter momentanément.
Bref la Corse n'intéresse plus la cour de France que comme monnaie d'échange dans les négociations avec l'Espagne.
Des négociations tenues à Vaucelle, naîtra donc une trêve de 5 ans, (5 février 1556).
Bien qu'Henri II ait proposé à Gênes de lui restituer la Corse, l'île continuera d'être occupée et administrée par la France jusqu'en 1559.
Sampiero revient en Corse et redonne confiance à ses compatriotes qui l'avaient cru mort.
Conformément aux accords de Vaucelle, les génois reprirent possession de certaines places fortes, Français et Corses occupèrent tous le reste de l'île.
Pendant ce temps Giordanno Orsini, alors général des troupes Françaises en Corse, s'enrichit en s'attirant la confiance du peuple Corse, par des promesses qui comprennent la totale implication de la couronne Française dans la cause insulaire. Promesses injustement fondées puisqu'Henri II ne se préoccupait que de fortifier l'île en vu d'une éventuelle négociation générale.
Les troupes Françaises et Corses ne sont pas payées (C'est Orsini qui empoche les soldes), leur mécontentement s'accroît, Sampiero brouillé avec Giordanno Orsini, et craignant même pour sa vie, repart pour la France.
L'enthousiasme Corse diminu, et Sampiero lui-même est discuté.
La trêve de Vaucelle n'est plus, et on assiste à une reprise des hostilités caractérisée par de petites opérations sans lendemain.
Une fois de plus, le destin de la Corse sera scellé ailleurs, de même qu'on ne lui avait pas demandé son avis pour l'envahir en Août 1553, on ne la consultera pas pour l'abandonner en Avril 1559.
Epuisé par ses propres problèmes (protestantisme, etc…), le royaume de France veut liquider les difficultés externes et envisage de se séparer de la Corse.
On en vint donc à la signature d'un traité beaucoup critiqué de part et d'autre, le traité de Cateau-Cambresis, où la France rend dans sa totalité la Corse à Gênes (3 Avril 1559).
L'office de St Georges qui reprendra alors le contrôle de l'île mettra en place une série de mesures dictatoriales qui mettront à jour l'excès de certains soldats (extorsions, réquisitions et exécutions) qui vas oppresser le peuple Corse trop affaibli déjà par la Guerre.
Le peuple gronde, la révolte repartira de plus belle avec le retour de Sampiero qui aidé en sous-main par Catherine de Médicis débarquera avec succès en Corse le 12 Juin 1564 dans le golfe du Valinco.
Le combat de Sampiero est solitaire, il se joue entre sa poignée de compagnons, ses partisans en Corse, et les troupes génoises dans l'île.
Il suffit d'un mois et demi à Sampiero pour occuper la majeur partie de la Corse. Les génois ne tiennent que les grandes villes abandonnant l'intérieur aux insurgés.
La réaction Génoise fut forte et rapide, de nombreux renforts commandés, par Stefano Doria débarquent sur l'île rasant et incendiant les villages et battant Sampiero lui-même près d'Ajaccio, le forçant à se retirer dans l'En-Deça-des-Monts.
Constamment renforcé en hommes, il brûle Cervione, punit les rebelles mais ne peut infliger à Sampiero une défaite décisive. C'est au contraire, celui-ci qui le harcèle et qui, aidé par la maladie qui frappe alors les soldats Génois l'oblige à s'enfermer dans Bastia, tandis que Corté se rend aux insurgés.
L'Offensive Génoise, si brillamment commencée fut un échec complet.
Gênes est réduit à demander du secours à Philippe II, qui lui permet fin Novembre la reprise, de Porto-Vecchio, d'Algajola et de Belgodère. Sampiero, blessé, doit s'enfuir.
Doria continue alors ses massacres et brûle 123 villages dans la seule année de 1566.
Lui promettant la Corse, Sampiero obtient du roi de France quelques secours, insuffisants, qui ne lui permettront pas de faire face aux offensives implacables de Doria.
Cette guerre est inhumaine, Sampiero rend coups pour coups, mais les défections et les trahisons commencent à se manifester dans ses rangs.
Gênes profitant de la situation mène de front la répression et l'incitation à la désertion, assortis de promesses de pardon auxquelles ne sont pas insensibles quelques féodaux du Sud.
On en arrive même à la conspiration dont l'issu sera le guet-apens d'Eccica-Suarella, près de Cauro, où Sampiero trouvera la mort (17 janvier 1567).
Sampiero mort, son fils, Alphonse alors âgé de 18 ans, continuera la lutte pendant deux ans, avec quelques centaines de fidèles. C'est en vain qu'il continue la politique de son père.
Dès lors, il ne reste plus qu'à se rendre dans l'honneur, ce que comprend Alphonse. Assuré de pouvoir quitter la Corse avec ses amis, et de pouvoir trouver refuge auprès du roi de France, il s'embarquera le 1 avril 1569, avec 300 de ses compagnons à destination de Marseille.
Ainsi s'achevait une guerre longue et cruelle. Une fois encore le prix payé par les Corses pour tenter d'obtenir leur indépendance est bien lourd.
Mais, en fait, s'agit-il bien d'indépendance ?, les Corses qui ont luttés avec Sampiero comprenaient-ils qu'ils ne faisaient que changer de maîtres ?
La pacification commence aussitôt, Gênes publie une amnistie qui n'est pas générale et qui connaitra de nombreuses représailles, les Corses étaient bien traités en vaincu.
150 ans de Présence Génoise
Entre une Guerre de dix ans (la Guerre de Corse) et une autre de quarante (la Guerre d'indépendance), la Corse connaît un long intermède de cent cinquante ans de Paix.
L'Office de St Georges s'étant déchargée de tous ses droits (moyennant un subside annuel important), c'est Gênes qui redevient maître de la Corse dès 1562.
On tenta de redonner une organisation stable à un pays appauvris et désorganisé.
On assiste alors à une organisation administrative dont le système assez souple respecte la structure traditionnelle, très diversifiée et autonomiste.
Chaque paroisse tente d'instaurer un système démocratique, mais doivent faire face à de nombreux problèmes notamment d'ordre économique.
Chaque ville reçoit un régime spécial, Calvi et Bonifacio, villes fidèles, se voient accorder des franchises et des exemptions, mais Bastia et Ajaccio, moins Ligures et moins sûres sur le plan de la loyauté sont surveillées d'un œil plus attentif et leur autonomie administrative n'est en fait qu'une apparence trompeuse.
Le royaume de Corse, car telle est son appellation officielle, est soumis à l'autorité d'un gouverneur, qui, comme il est naturel pour une colonie, est obligatoirement Génois.
Ce dernier instaura un système juridique et pénal qui n'était guère équitable, où les juges étaient impuissants ou corrompus.
Approuvés en décembre 1571, Les Statuts garantissaient un minimum de justice (notamment fiscale), et les Corses y étaient très attachés.
Puis le Syndicat fut créé. Il était une sorte de dernier rempart, du moins théorique, dressé contre l'injustice du système juridique instauré par les représentants de Gênes et leurs alliés Corses. Mais ce syndicat n'était guère actif, il ne siégeait que cent jours par an et ne s'occupait que des petites affaires sans véritable envergure.
Malgré tout gênes, accentuant de manière oppressive son administration, décida de limiter le pouvoir du syndicat à la délivrance de certificat d'honnêteté et d'innocence.
Le syndicat, continuait tout de même de représenter une espèce de défenseur ultime des insulaires qui étaientt très largement majoritaire. En effet les Corses y étaient trois fois plus nombreux que les Génois, mais le poids des voix de ces derniers avait été rehaussé afin, qu'au total il y est une sorte de parité entre juges Corses et Génois.
Malgré tout, les juges Corses semblant mettre trop de zèle à défendre leurs compatriotes, Gênes prit le parti radicalement efficace de supprimer la représentation Corse.
Mais le plus grave défaut de cette administration Génoise était sans doute son caractère d'exploitation étrangère. Car lentement, mais sûrement, les insulaires étaient éliminés au profit des Génois.
C'est une sorte de main basse sur l'île, que gênes administre tout en se croyant sure de l'impunité.
A présent, sur l'île, tout se vend et tout s'achète (port d'armes, exemption d'impôts et même grâce anticipée en prévision d'un crime futur).
La Corse est vraiment sujette et soumise à la loi Génoise, le peuple gronde, mais pour l'heure il doit payer et obéir.
Le maquis se peuple alors de condamnés par contumace d'autant plus déterminés à se défendre jusqu'à la mort que leur capture est synonyme de pendaison ou de galère et que, encouragée et récompensée par Gênes la trahison les guette à chaque détour de chemin.
L'insécurité régnant dans l'île, on en vint à moyenner une redevance de deux seini (monnaie génoise) pour le port d'arme. sage mesure qui permit un désarmement général bien accueilli dans l'île et une diminution de crimes de sang.
Les impôts instaurés (principalement la taille et le boatico) ne sont pas uniformes et frappent les plus démunis. De plus Gênes fait tout pour retirer aux insulaires la jouissance directe, si minime fut-elle des richesses du pays et instaure des monopoles sur de nombreux produits, y compris sur ceux devenus traditionnels depuis la plus haute antiquité.
Pendant cinquante ans (1587 à 1638 ), les Corses seront victimes d'une véritable spoliation.
Une politique de mise en valeur économique sera alors instaurée. Gênes encouragera à la plantation des arbres et des vignes, et à l'amélioration et l'accroissement du cheptel.
Malgré certaine mesures économiques, le cœur n'y est pas, pour exemple le procoio, qui interdit aux insulaires une jouissance totale de leur sol, les corses nommés pour une courte durée, cultivent des sols dont l'appartenance est génoise.
Mais qu'il s'agisse de commerce ou d'agriculture, la politique de Gênes est fonction des besoins de la métropole.
Aujourd'hui, par réaction, on semble plutôt porté à réhabiliter l'administration Génoise et à mettre en relief le développement de l'agriculture, la prospérité, le progrès intellectuel, artistique et moral de l'île, l'agrandissement des villes, l'ordre et la sécurité.
C'est cette trop grande colonisation qui sera à l'origine du prochain conflit.
Une colonisation mal accueillie par les habitants de l'intérieur qui se voient dépossédés de leur terre et contraints d'abandonner leurs troupeaux.
En effet, ce malaise des bergers est finalement l'aspect négatif de ce siècle et demi de paix génoise. Ces bergers, chassés des plaines par l'appropriation communale, coloniale et familiale, s'appauvrissent sous le poids d'une évolution qui accroît les besoins en numéraire sans en accroître les denrées, d'où une tension continuelle entre eux et les régions riches.
Tension qui finira par l'explosion de 1729, où d'après Ettori : La République recueillait ici les fruits amer d'une politique qui, en développant l'agriculture, avait spolié les bergers.
Un siècle et demi d'ordre Génois débouche ainsi sur une guerre de quarante ans.
Source : http://www.storiacorsa.com/