
Interview Atari
Le JDLI a rencontré Christophe Bombana (en photo), Directeur général d’Atari Méditerranée, Michaël Sportouch, Directeur et Frédéric Boulet, Directeur adjoint d’Atari France pour évoquer le présent et l’avenir du groupe.
JDLI : Quelle est la nouvelle philosophie d’Atari ?
Christophe Bombana : Atari est synonyme de jeu vidéo dans le monde entier, quelle que soit la langue parlée et jouit d’une incroyable notoriété au niveau mondial. Atari est un nom qui a fait rêver plusieurs générations et qui continue à faire rêver. En choisissant Atari comme signature, nous confirmons notre volonté de jouer un rôle majeur dans le secteur. Concrètement toutes les filiales portent aujourd’hui le nom d’Atari suivi du nom du pays, et les produits sont siglés Atari ; seule la holding conserve temporairement le nom d’Infogrames Entertainment. Atari est donc la suite logique d’Infogrames, elle en reprend la philosophie : faire du jeu vidéo un loisir mass-market, et dans ce contexte, se placer parmi les leaders mondiaux. Toute notre organisation, au niveau mondial, comme au niveau territorial est orientée vers un but : développer, produire et éditer des jeux qui correspondent aux attentes des différents publics du jeu vidéo. Depuis le très grand public qu’il faut amener vers notre loisir, jusqu’aux core gamers, qui ont des attentes très spécifiques.
Comment s’organise désormais Atari ?
C.B. : Au niveau mondial, l’organisation est en place depuis quelques temps déjà. Infogrames Entertainment SA, société mère du Groupe, est cotée à Paris (code Euroclear 5257) ; la filiale américaine Atari Inc. dirigée par Denis Guyennot, est quant à elle cotée au Nasdaq à New-York (sous le symbole ATAR); la structure européenne (non cotée) est dirigée par Christian Gloe. La profonde mutation du groupe et les restructurations engagées depuis plusieurs mois se situent au niveau mondial et concernent les différents territoires. L’objectif étant d’adapter nos différentes structures aux réalités du marché. En 20 ans, Infogrames avait grandi très vite et il fallait simplifier et rationaliser la structure. La stratégie long terme du groupe est bien entendu définie par Bruno Bonnell, Président du groupe et Thomas Schmider, Directeur Général, tant sur le plan financier, que sur la politique éditoriale (gestion des licences et des franchises du groupe), la gestion des studios de développement… A ce titre, notamment en Europe, la structure de publishing a été réorganisée et transférée aux Etats-Unis pour permettre aux différentes filiales de se concentrer sur la gestion de leur business localement. Effectivement, le rôle d’une filiale de distribution est bien d’appliquer la stratégie globale édictée par le management. Celle-ci doit l’adapter aux spécificités de son marché tout en développant un certain nombre d’innovations marketing, commerciales et en découvrant notamment de nouveaux talents. Ceci implique des niveaux de décision bien établis, avec une équipe dirigeante encore plus présente et plus réactive. La créativité se doit d’être à tous les niveaux de l’entreprise.
Vous dirigez Atari Méditerranée. Qu’est-ce que regroupe exactement cette structure ?
C.B. : les filiales d’Europe du Sud sont chapeautées par Atari Méditerranée, une structure que nous avons définie en fonction de critères quasi culturels. Elle regroupe la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, et la Grèce. Elle gère également les exportations vers le Moyen Orient, et le Benelux. La mission d’Atari Méditerranée est bien de dynamiser nos parts de marché en Europe du sud et d’assurer la croissance par l’ouverture de nouveaux marchés. Pour gagner des parts de marché, nous devons en effet parvenir à vendre nos produits dans un maximum de pays, mais également être attentifs à tous les talents qui s’y trouvent, en rencontrant de nouveaux développeurs par exemple. Dans ce domaine, l’arrivée de Christian Gloe à la tête de l’Europe est un atout supplémentaire, son expertise dans la recherche de nouveaux talents, de nouveaux produits ou de concepts dans ce domaine est considérable.
Quelle est l’actuelle organisation en France ?
C.B. : Siège historique du Groupe, la France a toujours occupé une place prépondérante dans notre organisation. Les récentes évolutions du groupe au niveau mondial et de notre industrie en général nécessitent d’adapter notre structure française afin de poursuivre un rythme de croissance soutenu. Ainsi, depuis le 1er juillet, Atari France est dirigé par un binôme composé de Michaël Sportouch au poste de Directeur et Frédéric Boulet comme Directeur adjoint. La recherche et l’intégration de nouveaux talents, que ce soit au niveau marketing ou commercial, sont primordiales pour redynamiser les équipes d’Atari France. Ainsi, l’arrivée de « nouvelles têtes » et la mise en place au service commercial de véritables Business Units vont nous permettre d’entretenir des liens encore plus étroits avec le marché dans son ensemble et nos clients distributeurs en particulier.
Qu’est-ce qu’une business unit chez Atari ?
Frédéric Boulet : Nous pensons que l’énergie d’une société de distribution doit toute entière être dirigée vers le business. Le client doit être le centre des préoccupations de notre organisation. A ce titre nous devons être capable de lui fournir tout l’environnement indispensable à une mise en place optimum de nos produits mais aussi à l’optimisation des ventes au consommateur final (marketing point de vente). A l’inverse le client est pour nous une source formidable d’information. La business unit est un centre de profit composé de trois à quatre personnes : un directeur d’enseigne véritable « patron » de celle-ci, un category manager en charge du trade marketing, et une ou deux personnes responsables de l’administration des ventes (mise à disposition d’informations, prise de commande, litiges, recouvrement). Ainsi toute une équipe est tournée vers le client, quelle que soit l’origine fonctionnelle de ces personnes. Nous mettons en place trois business units (Grande distribution, spécialistes/multi spécialistes, clients directs/grossistes).
Quel est le reste de la structure française ?
Michaël Sportouch : Nous avons un chef des ventes qui encadre neuf chefs de secteur. Sur le plan marketing, Atari France compte aujourd’hui trois brand manager qui se répartissent les produits selon les catégories. Les licences de cinéma hollywoodiennes sont sous la responsabilité de Raphaële Martinon, nouvellement arrivée chez Atari France. Les franchises originales, propriétés d’Atari sont sous la responsabilité d’Alexandre Enklaar ainsi que les titres destinés au plus jeunes. La gamme budget est sous la responsabilité de Lionel Arnaud. Le brand manager, dont le rôle est primordial, intervient durant toute la phase de commercialisation de son produit, et est en contact direct et permanent avec les distributeurs. Enfin, Beryl Gonnard est chef de produit sur les licences locales de type Titeuf et Astérix et les licences internationales comme Beyblade, destinées aux plus jeunes.
Le service communication/relations presse comprenant trois personnes vient en support du travail effectué par les équipes marketing. Au total, la filiale française se compose aujourd’hui de 38 personnes, structure idéalement dimensionnée pour un groupe international comme Atari.
Comment faire pour développer les ventes auprès du grand public ?
CB : Nous sommes sur un marché d’entertainment, tout comme l’industrie du cinéma ou de la musique. C’est pour cette raison que les licences à forte notoriété sont si importantes, qu’elles viennent de l’industrie cinématographique hollywoodienne ou de notre propre catalogue de franchises originales. Nous devons nous adresser aux consommateurs avec des messages clairs et compréhensibles par le plus grand nombre, et pas uniquement à destination d’un public « quasi professionnel du jeu vidéo » (hard core gamer). La stratégie mass-market d’Atari nous impose d’offrir au consommateur lambda, un produit adapté à ses attentes. Pour cette raison, il est nécessaire pour un éditeur global comme Atari d’ouvrir de plus en plus sa communication aux médias grand public, en plus des médias spécialisés. D’autres moyens peuvent aussi être utilisés comme le développement du co-branding et les opérations sur le terrain pour sensibiliser directement le consommateur final à un produit ou à une marque. Nous devons tous faire preuve de créativité, tout en appliquant des recettes commerciales et marketing qui ont fait leurs preuves sur d’autres marchés de produits de grande consommation.
Quel est le montant des investissements publicitaires en France ?
M.S. : Pour la seule filiale française, le montant des investissements marketing s’est accrû de 20 à 25 % par an depuis deux ans, concentré sur moins de titres qu’auparavant. C’est un effort considérable qui traduit la volonté du groupe de se focaliser sur des titres à fort potentiel pour accroître leur visibilité auprès du consommateur. Le succès commercial d’un jeu vidéo résulte de l’alchimie de ses qualités intrinsèques : gameplay, innovation technologique, qualité graphique, efforts marketing destinés à le promouvoir, mais également sa capacité à s’inscrire dans l’air du temps, qu’il s’agisse d’une création originale comme Kya ou d’une licence forte comme Dragon Ball Z. A l’heure du mass-market, nous devons nous appuyer sur un marketing massif.
Comment gérez-vous votre propre catalogue de licences ?
C.B. : En 20 ans, Infogrames a créé et géré un catalogue de produits impressionnant parfaitement équilibré entre licences prestigieuses et franchises originales. C’est maintenant à Atari de les faire vivre et prospérer. La gestion éditoriale de notre portefeuille de titres tient bien évidemment de notre environnement concurrentiel. Par exemple, dans le contexte concurrentiel actuel des jeux de rallye, aurions-nous raison de lancer le développement d’un nouveau V-Rally ou devons-nous attendre l’arrivée des consoles de nouvelle génération et ainsi présenter un produit réellement innovant ? Atari a de grandes ambitions pour ses franchises originales, à l’image de Driver, Unreal, Donjons et Dragons, Neverwinter Nights, Stuntman et autres. Fidèle à notre statut de créateur, nous continuerons à investir sur de nouveaux concepts et franchises originales.
Combien de produits commercialisez-vous en un an ?
M.S. : En un an, nous mettons sur le marché entre 80 et 100 références. Notre objectif est de lancer 25 produits à fort potentiel dont cinq “ triple A ”, à très fort potentiel, qui réaliseront plusieurs millions de pièces à travers le monde.
Atari est une marque qui véhicule une image forte, mode et fun. Comment comptez-vous la gérer ?
C.B. : Une marque est une conclusion, pas une introduction. Nous sommes en train de consolider la société autour de son métier, le jeu vidéo. Malgré l’arrêt de son exploitation commerciale officielle pendant 10 ans, la marque Atari a toujours été utilisée, bien souvent sans en avoir le droit, pour orner des tee-shirts ou des accessoires à la mode par exemple. Atari est toujours resté “ fashion ” et a une capacité de séduction intrinsèque incroyable. Nous sommes prêts à associer Atari à des personnalités ou à aider de jeunes artistes de talent à se faire connaître, mais ce type de développement n’est clairement pas notre priorité actuelle.
Qu’est ce qui pourrait empêcher Atari d’atteindre ses objectifs ?
C.B. : Il pourrait exister deux obstacles sur notre route. Le premier serait de négliger que nous sommes une entreprise mondiale d’entertainment, qui s’inscrit dans un contexte concurrentiel fort, et suscite des attentes de la part tant des consommateurs que des observateurs professionnels. Atari doit se comporter en industriel. Le second serait... de se prendre au sérieux ! La position d’Atari parmi les leaders de l’industrie ne nous autorise pas à tomber dans l’autosatisfaction mais au contraire nous nous devons d’ouvrir de nouvelles voies.
(Source : JDLI)
posted the 09/21/2003 at 12:38 PM by
Gamekyo