Entre les Everquest, les Dark Age of Camelot, ou encore le déjà très populaire World of Warcraft, se faire une place dans le cœur des joueurs n’est pas une chose facile, loin de là. Il y a pourtant un titre qui a réussi à convaincre pas mal de monde, The Saga of Ryzom. Développé par Nevrax, le jeu a su innover suffisamment pour offrir aux joueurs une nouvelle expérience de jeu. David Cohen, président de Nevrax, a accepté de faire le point sur son bébé qui, vous le verrez, n’a pas encore fini de grandir.
JeuxFrance : Afin de mieux vous faire connaître de nos lecteurs, pouvez-vous nous faire une présentation de vous-même et de votre société ?
David Cohen : Je suis le fondateur et président de
Nevrax, et le directeur éditorial de
The Saga of Ryzom (cela signifie que je suis responsable de l’univers et de l’histoire en particulier). Etant un gros joueur de jeux de rôle depuis l’âge de 8 ans (les jeux papier/crayon comme D&D) je cherche à tirer le genre MMORPG vers de nouveaux horizons qui se trouvent au-delà du modèle actuel. Les produits concurrents actuels tiennent davantage du parc d’attraction figé que du monde vivant et évolutif. En particulier, je cherche à donner aux joueurs une réelle identité au sein d’un univers cohérent et d’une histoire en mouvement. Forts d’une vraie liberté d’action, les joueurs doivent pouvoir donner un sens à leurs actions qui en retour doivent impacter l’histoire et le monde lui-même.
Nevrax est donc la société que j’ai fondée dans cette optique. Nous sommes entièrement dédiés au genre MMORPG et à ce qu’il doit maintenant devenir : des réalités alternatives, immersives et perméables aux actions des joueurs.
Continuons par les chiffres : quels ont été les moyens investis, non seulement en terme de budget, mais aussi en temps et en personnes pour arriver à la conception de Ryzom ?
Nos investisseurs ont déployé des moyens importants. Le montant de notre budget reste confidentiel, mais ils sont bien moins élevés que ceux de Blizzard. Cela dit, en partant de zéro, ils nous ont permis de créer et de sortir Ryzom (pré-production, recherche et développement, développement, infrastructure serveur & bande passante, marketing, service client, game mastering, etc.). Nous avions commencé avec une dizaine de personnes, et nous sommes actuellement environ 60 personnes. Le développement proprement dit s’est effectué sur près de 4 ans.
N’est-ce pas un pari difficile dans lequel vous vous lancez : faire face à de grosse pointures du genre, tels que World Of Warcraft, où prochainement The Matrix Online ?
On est passionné ou on ne l’est pas. Certes, les budgets importants de ceux de WoW ou Everquest offrent un avantage au moment de leur entrée sur le marché, car ils ont une grosse marque déjà connue et beaucoup de budget marketing. Mais ces produits reproduisent encore une fois le modèle basique de parc d’attraction. Ce modèle est intéressant pour les débutants en MMORPG, mais il reste frustrant pour ceux, de plus en plus nombreux, qui souhaitent avoir un rôle impliquant au sein d’un univers vraiment vivant.
WoW est un produit très positif pour le genre MMROPG en général car grâce à sa réputation, ce jeu permet de faire connaître le MMORPG à beaucoup de personnes. Ces joueurs auront dès lors envie d’aller vers d’autres univers et surtout avoir un vrai impact sur une histoire ou un monde à travers leurs actions. Ryzom est là pour cela : offrir une expérience plus profonde. World of Warcraft et
The Saga of Ryzom ne proposent donc pas le même type d’expérience de jeu. Là où WoW propose des tas de missions statiques,
The Saga of Ryzom propose aux joueurs de prendre position au sein d’un univers en mouvement perpétuel. Nous leur proposons de donner un sens à leur existence dans le jeu : défendre des causes comme lutter contre des dictatures, résoudre des mystères historiques pour reconstituer le puzzle de la vérité, ou encore participer à des évènements réguliers dont les conclusions impactent le monde et/ou l’histoire ne sont qu’un exemple des possibilités offertes dans Ryzom.
Dans les produits existants, les joueurs ne sont finalement que de passage et ne font que consommer des missions statiques sans espoir d’impacter l’histoire ou le monde. C’est un début pour un genre nouveau, mais certainement pas une fin en soi. Le potentiel MMORPG va bien au-delà. En ce qui concerne Matrix, je n’y ai pas joué, je ne peux donc pas en dire grand chose. Mais au-delà, je ne crois pas qu’il soit très raisonnable de tenter de marier de force le modèle MMORPG avec tous les blockbusters du cinéma souvent très contraignants au niveau du scénario. Le MMORPG est un nouveau genre de produit de divertissement qui va au-delà du jeu vidéo tel qu’on le connaît actuellement.
D’où vous est venu l’idée de créer un MMORPG dans cet univers végétal si particulier ?
Je rêve de pouvoir évoluer dans un monde virtuel vivant et immersif depuis mon enfance et les premiers jeux de rôle. Tout part de là en ce qui me concerne. Mais l’univers de Ryzom n’est pas que végétal. C’est Atys (la première planète dans la saga) qui est végétale. L’univers d’Atys est arrivé en deux temps. Dans un premier temps, nous avons passé en revue plusieurs propositions. Personnellement, je voulais installer le premier volet de la saga dans un univers totalement végétal, mais ouvert sur la techno et la magie. Ensuite, après avoir choisi le cadre de la planète végétale, nous avons développé en interne les différents endroits d’Atys, leur look, leur géographie, etc. La planète est bien plus vaste et variée que ce qui se trouve actuellement en jeu. Atys est un univers végétal et organique qui cache de nombreux secrets et mystères qui sont autant de clés pour comprendre les différents niveaux de l’histoire et découvrir l’existence et le rôle des autres mondes.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les nouveautés à venir dans The Saga of Ryzom ?
Nous développons et mettons en ligne des ajouts régulièrement (tous les mois et demi environ). Aujourd’hui, nous entamons un travail important d’amélioration et d’optimisation du jeu existant. Ceci est obligatoire avant d’entamer une nouvelle étape d’ajouts importants dans le jeu. Un MMORPG, c’est un peu comme un jardin, il faut l’entretenir, et bien enlever les mauvaises herbes avant de planter de nouvelles plantes.
Une fois cette étape franchie, des nouveautés seront ajoutées telles que les ‘outposts’ (qui sont des territoires que les joueurs pourront conquérir en guilde pour eux-mêmes, pour le compte de leur civilisation ou de leur faction). Nous travaillions parallèlement à une nouvelle version d’interface qui sera plus facile à prendre en main, mieux intégrée dans l’univers et plus efficace dans le lancement des actions de jeu. Nous sommes également en train de préparer notre nouvelle version des sites officiels qui nous permettront de communiquer plus facilement avec nos fans pour mieux les tenir informés (nous avons d’ailleurs nommé une personne en charge de cette communication officielle avec les fans).
Mais au-delà des nouveautés au niveau des mécaniques de jeu, beaucoup de nouvelles choses vont arriver du côté de l’univers d’Atys et du développement de l’histoire. Comment les peuples d’Atys sont organisés ? Quelles sont leurs entités gouvernementales ? Quels sont leurs buts ? Leur vie politique va démarrer et des alliances ou des oppositions vont se former au sein desquelles les joueurs vont pouvoir s’engager.
Il faut faire la différence entre Atys, la première planète qui se trouve être végétale, et l’univers de Ryzom qui compte plusieurs autres planètes et d’autres factions. Les œuvres de HP Lovercraft, de Philip K. Dick, de L. Asimov, de F. Herbert, de Miyazaki, de Otomo ou de Shirow m’ont beaucoup influencé. Ce n’est donc pas un hasard si vous retrouvez certains traits issus de ces univers. J’ai avant tout cherché à créer un mélange de genre afin d’ouvrir une dimension nouvelle où la SF et le Fantasy donnent naissance au cyber féerique.
JeuxFrance tient à remercier chaleureusement David Cohen pour nous avoir consacré un peu de son précieux temps.