Le saviez-vous ? Il est possible de jouer à longueur de journée, à des titres qui ne sont pas encore sortis ou même encore non dévoilés au grand public et de plus, de faire cela tout en étant payé. Vous ne me croyez pas et pourtant c’est vrai, voici en quoi consiste le dur labeur des gars de Bug Tracker. Leur but est de tester des centaines de jeux et logiciels avant leur mise en boutique. JeuxFrance a infiltré pour vous les locaux européens de cette mystérieuse entreprise. Qui n’a jamais rêvé, étant gamin, de pouvoir jouer éternellement ? Mais bien sûr, jouer est incompatible avec la construction de votre vie active et professionnelle. Enfin, tout le monde ne l’entend pas de la même oreille et c’est ce qu’a voulu prouver un groupe de personnes, fans de jeux vidéo, il y a six ans de cela. C’est en effet à ce moment-là que Bug Tracker est né. C’était l’époque où la mode était aux « start-up », qui se créaient tous les jours. Bug Tracker est l’une de celles qui existent encore aujourd’hui et qui, pour avoir combattu dans ce milieu pendant six années, reçoit comme récompense celle de s’être fait un nom.
Les chiffres, ce ne sont pas que la matrice, cela permet de savoir aussi ce que représente une société et la place qu’elle occupe dans le secteur. La société française n’est pas seule. Beaucoup d’autres existaient déjà, et ont voulu par la suite, elles aussi, une part d’un gâteau, qui allait devenir rapidement trop petit. Bug Tracker, c’est plus de 350 projets tous les ans, 16 heures de tests par jour. Mais passons à l’essentiel, en quoi consiste le travail de cette société ? Leur but est d’éradiquer, comme le nom l’indique, toute forme de bug dans les logiciels. Le point le plus important de la compagnie est donc d’assurer une qualité irréprochable aux titres sortant de leurs laboratoires. Les équipes sont composées de développeurs, graphistes et surtout de joueurs ; n’est-ce pas en fin de compte le plus important ? Ils disposent pour supports, de PC et de Mac, tous deux bénéficiant d’environ 150 configurations différentes. Ils travaillent aussi sur Game Boy Advance, Playstation 2, GameCube, Xbox et même sur téléphone portable ou Assistant Digital Personnel (PDA). Sachez que bon nombre d’éditeurs et de sociétés leur font confiance. Parmi elles, on retrouve
Atari,
Ubisoft,
Virgin,
Wanadoo Edition,
Microïd,
Hexacto,
Ingénio,
CNED,
Encyclopedia Universalis,
The Walt Disney Company,
Titus,
France Telecom Multimédia,
Doki Denki et j’en passe. C’est ainsi qu’en quelques années, les gars de Bug Tracker ont pu se faire connaître dans le domaine du loisir interactif.
Etablir une certification de qualité et ainsi proposer au grand public un service exempt de tout défaut n’est pas une tâche facile. Pour en arriver là, la société s’est fixé des règles précises à respecter et c’est très scrupuleusement que chaque logiciel est contrôlé en fonction de ces critères, avant d’être mis en rayon. Une assurance de qualité qui doit répondre à différents tests comme ceux de fonctionnalité, de compatibilité, de localisation, et de pré-soumission. Mais les tests ne s’arrêtent pas là, il faut aussi soigner la présentation du produit, avec un service qui s’occupe des traductions, de la relecture, correction et rédaction des manuels. Alors on peut tout d’abord voir l’aspect très amusant de cette activité : être payé pour jouer, mais il ne faut pas oublier qu’il y a aussi un formidable travail de recherche et de patience : refaire 10 à 100 fois les mêmes niveaux, passer à côté d’un pixel, longer un mur, découvrir le moindre petit bug caché. Les équipes de bêta-testing doivent faire et refaire un jeu un bon nombre de fois afin que rien ne leur échappe. Une tâche délicate, mais tout cela pour, au final, nous servir un plat chaud comme il le faut.
Cinq Questions à Bug Tracker
JeuxFrance a eu le privilège de poser quelques questions à M. Antoine Carre, Directeur de la Société Bug Tracker :
Jeux France : Afin de mieux vous faire connaître de vos lecteurs, pouvez-vous nous faire une présentation de votre société ?
Antoine Carre : Créée en 1999, Bug Tracker est une entreprise d’une quinzaine de personnes dont le siège social se situe en région parisienne. Elle a ouvert en 2002 une filiale au Canada.
Son activité est centrée sur le test qualitatif d’applications multimédia (jeux vidéo et CD-rom) et comporte trois pôles de tests : fonctionnalités, compatibilité et localisation. Elle propose également à ses clients une base de donnée on-line leur permettant de suivre en temps réel la détection des bugs.
Nos clients sont principalement les éditeurs et les studios de développement majeurs français ainsi que des studios de développement européens ou canadiens ou américains, sachant que nous disposons d’une filiale à Montréal.
Jeux France : Rentrons à présent dans le vif du sujet : quels sont les moyens nécessaires pour effectuer le test d'un seul et même jeu ?
Antoine Carre : En effet, la recherche de bugs n’est jamais laissée au hasard. Nous avons développé une méthodologie de tests applicable à de nombreux types de produits, que ce soit des jeux ou des applications plus sérieuses. Il n’y a pas à proprement parler de « recette » pour effectuer un bon test, mais certains ingrédients sont indispensables. Nos plans de test sont montés en étroite collaboration avec le commanditaire, afin de répondre au mieux à ses attentes : il est rare que deux tests se déroulent de façon identique, et cela demande de notre part une grande flexibilité.
Le protocole de test est basé sur notre méthodologie, mais varie en certains points en fonction du type de jeu. Il est évident que le style de jeu va influer sur notre façon de vérifier le jeu en question. Une simulation de foot ne sera pas traitée de la même façon qu’un FPS.
Nous considérons que chaque jeu est unique, et notre façon de le tester doit s’y adapter. Enfin, il faut ajouter que le type de test demandé modifie également notre façon de tester le jeu : nous devons effectuer une sélection pertinente des informations susceptibles d’intéresser le développeur.
Le temps imparti pour tester un jeu dépend de plusieurs facteurs : l’état du jeu lorsque nous le recevons, le type de test demandé, et bien sûr le type de jeu. Disons qu’il nous est arrivé de tester un titre en quelques heures seulement comme il nous est arrivé de passer plusieurs mois (plusieurs milliers d'heures) sur certains projets. En tant que prestataire de service, le client impose ses impératifs de délais, mais nous avons une marge de manœuvre qui peut varier en fonction du nombre de bugs trouvé en un temps donné. Même si le client a le dernier mot, nous avons toujours la possibilité de donner notre avis.
Il n’existe pas de type de jeu spécifiquement plus problématique qu’un autre : la durée de vie du titre est un facteur déterminant, mais on peut aussi bien rencontrer d’énormes problèmes sur un jeu de plates-formes simple et linéaire que sur un RPG demandant un temps de parcours considérable.
Jeux France : Une question que beaucoup de personnes se posent : n'est-il pas difficile de jouer toute la journée ?
Antoine Carre : En fait, nos équipes de testeurs ne passent pas leur journée à "jouer", mais à tester. Ce qui est très différent. Tester signifie, que par l'expérience acquise, chaque jeu est "analysé" avec la vision d'un professionnel du développement, un regard nouveau et indépendant des équipes de développement. C’est aspect confère à nos équipes un savoir-faire reconnu, nous permettant de faire des préconisations sur la résolution des problèmes rencontrés et sur le gameplay des jeux.
Non, je ne pense pas qu'il soit difficile de tester des journées complètes, d'autant plus que les heures de pauses sont souvent réservées...... à des parties de jeu en réseau entre tous les membres de nos deux équipes : Paris et Montréal
Jeux France : En moyenne, combien de jeux et logiciels testez-vous par an ?
Antoine Carre : En moyenne, nous testons plus de 300 jeux et cédéroms par an.
Les jeux console sont testés exclusivement sur des consoles de test, obtenues directement auprès des constructeurs. Les machines de test PC sont montées à la demande, et changent d’un test à l’autre. On ne peut par conséquent pas parler de machine « type ». Cependant, nous devons suivre les tendances du marché, en nous assurant de rester le plus proche possible du parc de machines qu’on rencontre chez l’utilisateur final.
Jeux France : Y a-t-il certains éditeurs plus pointilleux que d'autres ou bien la charte de qualité est-elle la même pour tous ?
Antoine Carre : Il faut faire dans un premier temps une distinction entre les jeux PC et les jeux consoles.
Sur les jeux PC, nous avons tout d’abord le test de fonctionnalité, dans lequel il s’agit de relever la totalité des bugs fonctionnels rencontrés. Ces bugs vont du problème de texture mal positionnée au plantage pur et simple.
Nous sommes souvent mis à contribution pour effectuer des tests de compatibilité matérielle visant à vérifier le bon fonctionnement d’un jeu pour un ensemble de cartes graphiques ou de processeurs. Nous vérifions dans ce cas l’absence de bugs d’affichage (la qualité de restitution du jeu, des cinématiques, et du graphisme en général). Nous sommes aussi amenés à faire une vérification de la localisation de jeux, c'est-à-dire contrôler la traduction, tant au niveau linguistique, culturel, que par rapport aux problèmes de fonctionnement qui peuvent en découler.
Concernant les jeux sur consoles, nous couvrons plusieurs domaines. Outre le test classique de fonctionnalité, nous couvrons également le domaine de la localisation, pour lequel les tests sont globalement identiques aux tests effectués sur PC, avec les termes spécifiques à chaque console. Il faut signaler un point important concernant les consoles : le bug qui va poser problème lors de la « soumission » : Chaque jeu console mis sur le marché doit en effet passer par une phase de validation (qu’on appelle habituellement « approval » ou « soumission »), au cours de laquelle le constructeur vérifiera que le jeu est conforme aux normes qu’il impose. Nous intervenons en amont de cette validation afin de déceler les problèmes qui pourraient entraîner un refus du constructeur, et par conséquent retarder la sortie du jeu.
En ce qui concerne les jeux sur consoles, il est à noter que les jeux devant être édités (Xbox, PS2, GameCube, GBA,...) doivent subir avec succès une série de tests - appelés tests de soumission - dans les labs de tests de ces fabricants de consoles, assurant ainsi un très bon niveau de qualité.
Pour les jeux PC, en fonction d'un parc matériel sans cesse en évolution, des patchs permettent, après la mise sur le marché des jeux, de fixer des problèmes inhérents à telle ou telle nouvelle carte graphique, micro-processeurs ou système d'exploitation.
En conclusion, la qualité des jeux est un sujet primordial pour les développeurs et les éditeurs et les laboratoires de tests de jeux vidéo dont nous faisons partie forment un élément essentiel d'une industrie en plein essor, dont les rouages se mettent en place jour après jour.
Merci à l’ensemble de l’équipe de Bug Tracker en France et à Montréal pour leur aimable coopération à la réalisation de ce dossier. Nous vous invitons à découvrir le site officiel de la société à cette adresse :
http://www.bug-tracker.com